Homélie prononcée par Monsieur l’abbé Xavier Snoek pour la messe célébrée le samedi 22 janvier 2022 en la Basilique Royale de Saint-Denys à la mémoire de la mort de Louis XVI, Roy de France et de Navarre.
Au nom du Père…
Chers frères et sœurs
1. Prenons conscience du contexte de violence dans lequel nous vivons
Je voudrais commencer cette homélie par une citation de Bernanos au début du dialogue des carmélites, quand il veut ainsi camper le décor si je peux parler ainsi !
« On parle volontiers aujourd’hui d’émeute ou même de révolution, mais qui n’a pas vu la multitude en panique n’a rien vu…
Tous ces visages à la bouche tordue, ces milliers et ces milliers d’yeux
D’une extrémité à l’autre, la place s’est mise à bouillir. »
Il faut imaginer que c’est ce qu’ont vécu depuis juin 1789, Louis XVI, sa famille, la France.
Malheureusement en mai dernier, lorsque j’ai participé à la procession qui commémorait les martyrs de la Commune de Paris, et qu’elle a été attaquée, je me suis remémoré cette phrase, tant la situation me semblait comparable.
Un cap dans la violence venait d’être franchi car je ne pense pas, au moins en France, qu’une procession ou même un office ait été attaqué par une foule et soit restée impunie même pendant les révolutions.
Avant et après, en France et ailleurs, dans une indifférence quasi générale , des tabernacles sont profanés, des statues comme ici sont brisées, et bien pire des chrétiens sont tués.
Maintenant, la France compte ses martyrs, deux prêtres et trois laïcs, et cela ne doit pas nous faire oublier les nombreux chrétiens assassinés dans le monde par haine de la foi.
3500, l’an dernier semble-t-il.
Ainsi nous vivons maintenant dans notre beau pays de France dans une atmosphère de violence.
Cette atmosphère se décline dans toutes les situations, lieux publics, hôpitaux, établissements scolaires, quartiers de nos villes, immeubles, familles.
Nul lieu n’y échappe au point qu’une petite fille de 11 ans subissant le harcèlement des ses camarades s’est défenestrée, il y a quelques semaines et pas dans une zone de non droit, mais en plein centre de Paris ! Hier, ce fut un jeune de 20 ans.
En effet, il est probable que la situation de la pandémie avec son cortège de mesures qui brisent les liens affectifs et sociaux, a exacerbé les tensions et les rapports même quotidiens sont partout tendus et même parfois violents.
Nous n’en sommes pas vraiment tous conscients, mais je crois qu’il faut nous rendre à l’évidence que nous avons basculé dans un monde déchiré tel que l’ont connu les contemporains de Louis XVI.
Depuis deux ans nous ne sommes jamais surs du lendemain, nous ne pouvons faire de projets, nous vivons au rythme de l’annonce des décès et des contaminés comme les français de 1793 et 1794 qui vivaient au rythme du nombre de condamnés et d’incarcérés.
Nous vivons inquiets et angoissés, car le monde dans lequel nous vivions a disparu.
Un monde où la médecine et l’argent semblaient pouvoir nous apporter le bonheur.
Mais, c’était une illusion car un jour où l’autre comme l’a dit Jésus « cette nuit on reprend ta vie, et ton bien qui l’aura ? »
Oubliant Dieu après avoir attendu sur terre le « grand soir » nous avons cru à une perpétuelle embellie.
Mais celle-ci s’est enténébrée depuis le début du siècle.
Nous nous étions trompés de paradis !
Celui-ci n’est pas sur terre.
Jésus nous promet la résurrection comme nous le dit l’évangile que nous venons d’entendre.
La volonté du Père est que le Fils nous ressuscite au dernier jour. `
La volonté du Père n’est pas de prolonger notre vie sur cette terre éternellement.
La volonté du Père n’est pas de prolonger la vie de la planète terre éternellement.
Elle passera !
L’univers dans lequel nous sommes, passera
Quoi que nous fassions !
Même si nous ne mangeons que de l’herbe et nous déplaçons à pied ou à vélo !
Oui, nous mourrons
Cette terre passera
Ce monde passera.
2. Tournons nous vers le Ciel
Mais Jésus nous promet la vie éternelle
Il nous promet un autre monde
Cela Louis XVI le croyait fermement
Sa sœur Madame Elisabeth également, elle qui sur le chemin de l’échafaud encourageait les autres condamnés, leur faisant entrevoir le ciel comme le lieu des retrouvailles avec ceux qui étaient déjà partis,
et d’ailleurs pour la plupart exécutés les jours précédents.
Nos ancêtres vivaient parfois trop dans la peur de l’enfer, mais ils vivaient dans la perspective de l’éternité.
Nous, nous avons oublié de regarder le Ciel.
Nous vivons trop les yeux rivés sur la terre, voir sur notre petite personne.
Cessons de croire en la médecine, croyons vraiment en Dieu sauveur !
Car là est bien le sujet.
Il y a une condition pour entrer dans la vie éternelle comme le dit ce passage de l’évangile selon saint Jean c’est de croire.
Et ce que Jésus nous dit, aujourd’hui plus spécialement, c’est qu’il nous faut croire en Lui, Jésus, le pain de vie.
Cela, Louis XVI le croyait fermement.
Sa sœur, Madame Elisabeth, avait réussi à garder le contact avec son confesseur et c’est lui que Louis XVI put obtenir, afin qu’il célèbre pour lui la messe au matin du 21 Janvier.
C’est la seule chose qu’il fit ce jour là.
Pour lui, voir le Christ dans son Eucharistie, dans le pain de vie, était ce qui lui fallait faire pour recevoir la vie éternelle.
C’était le plus important à faire avant de mourir
Voir le Christ et communier au pain vivant descendu du Ciel.
Et nous, qui avons accepté pendant le confinement de nous en priver ! Quelle inconscience !
Il y a 100 ans, cette année, l’empereur Charles d’Autriche mourait devant le saint sacrement exposé.
Tout comme Louis XVI, Madame Elisabeth, ou encore son épouse Zita de Bourbon Parme, Charles croyait, que mourir en adorant le pain de vie, en adorant le Corps sacré du sauveur, lui obtiendrait la vie éternelle et qu’ainsi comme il l’a dit à l’impératrice Zita, ils se retrouveraient tous les deux dans le Cœur de Dieu.
Se retrouver dans le Cœur de Dieu, quel beau programme !
3. Se confier au Cœur du Christ
Mais pour cela il nous faut dès ici bas comme le dit Jésus dans ce passage du sermon dans la synagogue de Capharnaüm, il nous faut venir au Christ.
Cela veut dire répondre à l’appel de Jésus comme les premiers disciples « venez et voyez »
On sait maintenant que dans le bréviaire qu’il a emporté avec lui dans le carrosse qui l’a mené à l’échafaud Louis XVI avait la prière que récitait aussi sa sœur et ses parents, cette prière connue sous le nom de prière de Madame Elisabeth et qui est extraite d’un petit livre intitulé « le parfait adorateur du Sacré Cœur »
On ne connaît pas beaucoup la prière de Louis XVI mais on peut penser que formé par les mêmes prêtres que Madame Elisabeth il partageait cette forme de prière, c’est à dire une prière au cœur du Christ, une prière faite toute de confiance en Dieu miséricordieux
« Mettons en Dieu seul notre confiance. Il sait ce qu’il faut à chacun de ses enfants, nous ne sommes pas fait pour vivre heureux dans ce monde. La vue de l’éternité devrait nous soutenir tous »
Allons à Dieu tout simplement que la Foi nous fasse voir qu’il n’abandonne jamais ses enfants. » nous dit Madame Elisabeth
Aussi on peut imaginer que mentalement Louis XVI a récité aussi la consécration au Cœur de Jésus que Madame Elisabeth avait composée, offrant alors sa vie avec confiance à son Seigneur qu’il avait vu et reçu le matin même :
« Cœur adorable de Jésus, sanctuaire de cet amour qui a porté un Dieu à se faire homme à vie pour notre salut et à faire de son corps la nourriture de nos âmes, en reconnaissance de cette charité infinie je vous donne mon cœur et avec lui tout ce que je possède au monde, tout ce que je suis, tout ce que je ferai, tout ce que je souffrirai. Mais enfin, mon Dieu, que ce cœur, je vous en supplie, ne soit plus indigne de vous ; rendez le semblable à vous même, entourez le de vos épines pour en fermer l’entrée à toutes les affections déréglées ; établissez-y votre croix ; qu’il en sente le prix ; qu’il en prenne goût ; embrassez le de vos divines flammes. Qu’il se consume dans votre gloire, qu’il soit à vous après que vous avez voulu être tout à lui. Vous êtes sa consolation dans les peines, le remède à ses maux, sa force et son refuge dans les tentations, son espérance pendant la vie, son asile à la mort.
Puissions-nous à la suite de Louis XVI et Madame Élisabeth, en ces temps de violence nous tourner avec confiance vers le Cœur de Jésus.
Amen